Il est souvent dit que lorsqu'une personnalité disparaît, il lui faut traverser une période, plus ou moins longue, de purgatoire avant que son rôle soit estimé à sa juste place. Il se pourrait qu'il en aille différemment pour Michel Rocard. 2018, en effet, sera une année où les circonstances des anniversaires feront apparaître les trois dimensions principales de sa pensée et de son action. Qu'on en juge : mai 1968, le militant, mai 1988, le Premier ministre, juin 1988, le décolonisateur.
Mai 1968, d'abord, dont Michel Rocard fut un acteur important, à la tête du PSU. Alors qu'il était devenu son secrétaire national depuis un peu moins d'un an, il a été un de ceux qui ont le mieux compris le sens du mouvement, une grande aspiration à davantage de libertés et de responsabilités, qu'a symbolisée la notion d'autogestion.
- Un colloque organisé par notre association et les Amis de Tribune socialiste, le 23 novembre 2017, a apporté des réflexions et des témoignages précieux sur ces années. Son déroulé, avec toutes les interventions, sont d'ores et déjà visibles sur notre site.
Mai 1988, c'est l'entrée à Matignon, pour trois ans et, après les ministères du Plan et de l'Agriculture, la tentative de faire entrer dans les faits une vision de la politique nourrie pendant plus de deux décennies. Les conditions politiques n'ont pas été faciles dans une quasi-cohabitation avec François Mitterrand, mais l'action a eu sa cohérence et ne se résume pas seulement à quelques mesures phares, tout aussi importantes soient elles, le RMI et la CSG.
- Notre association, en partenariat avec Sciences Po, les Archives nationales et la Fondation Jean Jaurès, contribue à préparer un important colloque, qui se tiendra sur deux jours, les 17 et 18 mai, à Paris, pour revenir sur « Michel Rocard : Premier ministre de 1988 à 1991 », avec l'intention de mener une réflexion sur la « Deuxième gauche et le pouvoir ». Il mêlera, comme il est de coutume, les rapports des chercheurs et les témoignages des acteurs. Il bénéficiera de l'ouverture des archives de Matignon et donnera ainsi des éclairages nouveaux.
Juin 1988, les accords Matignon sur la Nouvelle-Calédonie ont permis de sortir la France d'une crise grave, qui avait déjà tué et pouvait le faire encore plus. C'est tout entier l'ancien militant anticolonialiste, fort des leçons tirées des impasses anciennes, qui s'est investi pleinement dans la résolution du conflit.
- Notre association apporte son appui au projet qu'a soumis Jean-François Merle à France O, en lien avec la maison de la Nouvelle-Calédonie à Paris et l'Université de Nouméa, de réaliser une émission de télévision en duplex, à Paris et à Nouméa, les 25 et 26 juin, avec des documents et des acteurs pour mettre en évidence ce qu'a été « la méthode Rocard ».
Bref, une année chargée d'initiatives, qui n'a pas pour ambition le seul souvenir commémoratif, mais qui entend surtout apporter des éléments de réflexion sur ce que peut nous suggérer pour notre temps ces expériences passées (et toujours vives à notre mémoire pour nombre d'entre nous).
Alain Bergounioux pour le Conseil d'administration
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