Si ce message ne s'affiche pas correctement ou si vous désirez imprimer ce numéro, téléchargez la version pdf ou contactez-nous. |
|
A la suite d'une erreur technique, une première diffusion de cette newsletter s'est faite avec des illustrations décalées par rapport au texte. Nous prions nos lecteurs et contributeurs de nous en excuser. Voici la version de cette lettre telle que vous auriez du la recevoir.
Vous avez dit « deuxième gauche » ?
Lors de la disparition de Jacques Delors, la presse, presque unanime, a considéré que la France et l'Europe perdaient en lui un homme qui avait incarné la « deuxième gauche ». Il en avait été de même lors du décès de Michel Rocard. Que la « deuxième gauche » ait eu plusieurs incarnations est une évidence – et il faut s'empresser d'y ajouter le nom d’Edmond Maire. Mais ce qui a été frappant c'est, en quelque sorte, l'aplatissement de la signification donnée à cette « deuxième gauche ». La plupart des articles la considèrent comme un simple réformisme, parfois identifiée à la politique de la « rigueur » menée après le printemps 1983. Ce n'est pas faire grand cas de son sens historique. Et c’est d’autant plus fâcheux que, pour bien s'orienter dans notre présent, il faut avoir une relation exacte avec notre passé.
Pour ce faire, il faut commencer par prendre en compte l'importance des années de la guerre d'Algérie, à cheval entre la IVe et la Ve République. Tout un ensemble de mouvements – la « petite gauche », comme le disait alors Guy Mollet – où les chrétiens de gauche ont joué un rôle majeur, politiquement dans de petites organisations, syndicalement dans la CFTC puis la CFDT et l’UNEF, ont conflué avec des socialistes laïcs, en rupture de SFIO, et avec des militants communistes et trotskystes dissidents, dans une condamnation morale de la politique algérienne menée par les gouvernements français et dans une opposition déclarée. La notion de « deuxième gauche », quant à elle, est apparue bien plus tard – formellement avec le livre écrit par Patrick Rotman et Hervé Hamon, en 1982, consacré d'ailleurs principalement à la CFDT. Mais la réalité était là, avec ses potentialités. Avec l'installation de la Ve République, deux voies se sont affirmées, l'une politique, avec la création du PSU, creuset de tendances différentes, allant d'un socialisme réformiste rénové à des attitudes révolutionnaires, l'autre syndicale, avec la place prise par la CFDT, non sans évidemment de nombreuses interpénétrations personnelles. Il en a résulté l'expression d'une culture politique, au-delà des divergences et des oppositions, faite d'une valorisation de la société par rapport à un État centralisé comme le faisait le gaullisme, d’une attention aux mouvements sociaux, d'une volonté de diffuser les pouvoirs, d'une exigence éthique. C'est le fond de cette « deuxième gauche », plus riche et plus large que le résumé qui en est fait aujourd'hui. Elle a autorisé plusieurs chemins, et pour en rester à Jacques Delors et Michel Rocard, un engagement principalement syndical, et d'expert solide du social, pour le premier, un itinéraire, principalement politique pour le second, malgré toutes critiques qu'il a pu formuler sur la vie politique... Dans les années 1970, une cristallisation s'est opérée. Car le Parti Socialiste, reformaté au congrès d'Épinay en juin 1971, a occupé désormais une place centrale à gauche. Le débat s'est passé pour beaucoup en son sein, tout particulièrement dans les années 1974-1980, entre les « Assises du socialisme » à l'automne 1974, où la CFDT était présente par délégation, et la candidature inaboutie de Michel Rocard à l'élection présidentielle de 1981. Celui-ci avait codifié l'opposition entre ce qu'on a pris l'habitude d'appeler la « première » et la « deuxième » gauche au congrès de Nantes en 1977. Il est intéressant de se remémorer comment il définissait la culture dont il voulait être le porteur : « L'autre culture qui réapparait dans la gauche française, elle est là, elle est décentralisatrice, elle est régionaliste, elle refuse les dominations arbitraires, celle des patrons comme celle de l'État. Elle est libératrice, qu'il s'agisse des majorités dépendantes come les femmes ou qu'il s'agisse des minorités mal accueillies dans le corps social : jeunes, immigrés, handicapés. Cette culture se fait fi des règlements et de l'administration. Elle préfère l'autonomie des collectivités et la pratique de l'expérimentation. » Vaste programme ! Où l'on retrouve bien les aspirations de la fin des années 1960. Mais, presque immédiatement, une autre dimension est venue s'adjoindre à ce socle, celle de la responsabilité économique, que l'approche, désormais vraisemblable, de l'exercice du pouvoir rendait nécessaire. Non qu'elle n'ait pas suscité le débat auparavant, avec notamment Pierre Mendès France et le colloque de Grenoble en 1966. Mais les années post-1968 l'avaient fait passer au second plan. Aussi, deux ans après le discours des deux cultures, à Nantes, cette fois-ci au congrès de Metz en 1979, la « deuxième gauche » s’est faite le défenseur du rôle de l'économie de marché dans les futures politiques socialistes. Il y avait là une certaine logique pour celles et ceux qui ne concevaient pas un socialisme sans les libertés. Il est significatif que cela fût dans le même temps que la CFDT a entamé son processus de « resyndicalisation », qui a amené à valoriser le « contrat » aux dépens de l'autogestion. Il faut ainsi donner à la « deuxième gauche », comme à la première d'ailleurs, toute leur chair historique pour qu'elles continuent de nous parler aujourd'hui. On sait que la longue période où la gauche socialiste a été au pouvoir, après mai 1981, a fait un tri dans les ambitions respectives des deux gauches. Il s'est agi, à partir de leurs caractéristiques propres, de penser et de mettre en œuvre un socialisme réformiste rénové. Une part des aspirations de la « deuxième gauche » a cependant trouvé à se réaliser, que cela soit avec Michel Rocard dans ses différentes fonctions ministérielles et surtout, évidemment, à Matignon, ou avec Jacques Delors à la tête de la Commission Européenne. Mais le contexte mondial n'était plus celui des années 1960-1970, avec la réalité de la mondialisation libérale et de ses contraintes. Dans le fond, ce furent, presque concomitamment, l'échec de Michel Rocard, aux élections européennes de juin 1994, qui a donné un autre cours à sa vie politique, et le renoncement de Jacques Delors à être candidat à l'élection présidentielle, en décembre de la même année, qui ont signifié la fin institutionnelle de la « deuxième gauche », même si, bien qu'éclatée, elle sert (et pourra servir) de référence possible pour des politiques contemporaines. Alain BERGOUNIOUX Président du Conseil scientifique de MichelRocard.org |
Louis Le Pensec, un menhir disparaît |
Il y a plus de deux ans, déjà, nous avions sollicité Louis Le Pensec pour qu'il contribue à notre rubrique "Parcours rocardien". Son état de santé s'était déjà trop détérioré pour qu'il réponde positivement à notre demande. Mais il a tellement compté pour Michel Rocard et tous ceux qui l'ont accompagné qu'il n'était pas imaginable de ne pas l'évoquer dans cette lettre, dans toute sa dimension humaine et politique. C'est pourquoi ce "parcours" est malheureusement posthume, empreint de toute l'estime et de l'affection que suscitait "le grand Louis".
Dans le premier gouvernement Rocard, nommé le 12 mai 1988, Louis Le Pensec avait retrouvé « son » ministère de la Mer. Celui qu’il avait créé en 1981, concrétisant ainsi toute une réflexion menée dans les commissions du Parti socialiste avant l’alternance. Celui pour lequel il avait démissionné du gouvernement en 1983, quand ce ministère avait été rabaissé au rang de secrétariat d’État. C’est qu’il était comme ça, Louis Le Pensec : on fait ce qu’on a dit et on ne transige pas sur les convictions. C’est dire que lorsque le 27 juin 1988, au lendemain de la signature des accords de Matignon, Michel Rocard l’appelle pour lui proposer le ministère de l’outre-mer, ce fut un déchirement. Rocard insiste : « Louis, c’est pour la Calédonie. Et il n’y a qu’un Breton qui puisse comprendre les Kanak ». Le Pensec finit par se laisser convaincre. Il était comme ça, le « grand Louis » : un homme de devoir, de défis et d’engagement.
C’est vrai qu’il incarnait presque physiquement la Bretagne : grand et droit comme un menhir, le regard bleu comme l’océan, le visage taillé à la serpe. Né en 1937, à Mellac, près de Quimperlé, dans une famille très modeste – son père était ouvrier agricole puis ouvrier dans une papeterie –, septième d’une fratrie de huit enfants, et le premier à poursuivre des études secondaires, il n’a jamais oublié d’où il venait. Quand, pour entrer dans une case kanak, il devait courber sa grande silhouette et s’asseoir sur des nattes, il lui arrivait de dire que ça lui rappelait la maison familiale, au plafond bas et au sol en terre battue. Après le baccalauréat, il poursuit des études supérieures à Rennes puis à Paris. Sérieux dans ses études, il anime aussi avec humour la vie étudiante : en lui remettant la Légion d’honneur en 2009, Michel Rocard rappelait qu’il avait été élu « président des sciences hilares de la faculté de Rennes » ! C’est aussi à Rennes qu’il rencontre Colette, qu’il épouse en 1963, et avec qui il formera un couple fusionnel. Licencié en lettres et en économie politique, diplômé de l’institut d’administration des entreprises et de l’institut des sciences sociales du travail, il entre dans la vie active comme attaché de direction à la SNECMA – devenue Safran – puis comme responsable des ressources humaines à la SAVIEM, la branche poids lourds du groupe Renault. Retour au pays et engagement politique Mais la Bretagne lui manque, et avec elle sans doute la possibilité d’un engagement plus marqué au service du bien public. C’est la lecture de « la Vie ouvrière », l’hebdomadaire de la CGT, auquel son père était abonné, qui a forgé sa conscience politique et sociale dans ses jeunes années. Étudiant, il adhère à l’UNEF et milite contre la guerre d’Algérie et la torture. A Paris, il fréquente le « Club des bonnets rouges », créé par Charles Hernu et associé à la Convention des Institutions Républicaines de François Mitterrand. En 1970, il revient au pays et prend un poste de chargé d’enseignement à l’Université de Rennes. Très vite, l’aventure politique commence. En 1971, il est élu maire de Mellac à la tête d’une liste d’union de la gauche, mandat qu’il conservera sans interruption jusqu’en 1997. Deux ans plus tard, il conquiert la circonscription de Concarneau et à l’âge de 36 ans, est élu député du Finistère : il le restera – à l’exception de ses passages au gouvernement où il sera remplacé par son suppléant – jusqu’en 1998. En 1976, il est élu conseiller général du canton de Quimperlé et siègera jusqu’en 2008 à l’assemblée départementale. Quand il quitte l’Assemblée nationale en 1998, c’est pour conduire la liste aux élections sénatoriales : il obtient trois sièges et permet ainsi aux socialistes du Finistère d’avoir leur première représentation au Sénat depuis 1958. Il était aussi comme ça, Louis Le Pensec : jamais battu aux élections, fidèle à ses électeurs comme ses électeurs lui étaient fidèles, et toujours attentif à passer le témoin quand il quittait l’un de ses mandats. Un peu après le congrès d’Épinay, il rejoint le Parti socialiste. Au milieu des années 70, le débat entre François Mitterrand et Michel Rocard devient plus aigu : au congrès de Nantes, en 1977, le discours de Michel Rocard sur « les deux cultures » marque les esprits. Et pour la Bretagne, décentralisation, reconnaissance des identités culturelles régionales, innovation sociale et économique, ce sont des idées qui résonnent. Avec Charles Josselin, Bernard Poignant, Marie Jacq, Louis Le Pensec va devenir un des mousquetaires de la « deuxième gauche » rocardienne en Bretagne, qui s’affirme notamment lors du congrès de Metz en 1979. Son engagement est dicté par des convictions, par l’adhésion à un projet politique, pas par une allégeance : il conservera des liens avec François Mitterrand empreints d’une estime réciproque. Trois fois ministre En 1981, sa nomination place de Fontenoy, au ministère de la Mer, est une consécration. Il lui faut d’abord construire ce ministère à partir d’éléments administratifs épars, avec l’aide experte de son directeur de cabinet Jean-Claude Boulard, et parallèlement mener de front plusieurs négociations internationales décisives, sur « l’Europe bleue » et sur la Convention des Nations-Unies sur le droit de la mer, dite de Montego Bay, conclue en 1982. Il a décrit cette aventure dans ses mémoires, « Ministre à bâbord », publiées en 1997. En 1983, il a donc refusé le secrétariat d’État qu’on lui proposait et, comme à cette époque les ministres non reconduits ne retrouvaient pas automatiquement leur siège au Parlement, il a demandé à son suppléant, Gilbert Le Bris, de démissionner et s’est représenté devant les électeurs : malgré la conjoncture globalement défavorable pour la gauche après le « tournant de la rigueur », il est réélu dès le premier tour, avec à peine deux points de moins qu’en 1981… En juin 1988, il arrive au ministère qui s’appelait encore des DOM-TOM après la conclusion des accords de Matignon mais avec la lourde tâche de les mettre en œuvre. Avec intelligence et sensibilité, dès le mois d’août, il conclut les accords Oudinot, qui parachèvent les accords de Matignon et, avec son directeur de cabinet Alain Christnacht, en conduit avec succès la mise en œuvre pendant cinq ans - un record à ce poste sous la Ve République. Les témoignages venus de Nouvelle-Calédonie après son décès en attestent. Pour Roch Wamytan, indépendantiste, président du Congrès de Nouvelle-Calédonie : « C'était vraiment une personnalité empreinte d'une grande humanité qui écoutait beaucoup, contrairement à ses collègues actuels ». Et pour Pierre Brétegnier, « loyaliste », ancien directeur de cabinet de Jacques Lafleur : « C'était quelqu'un que tout le monde aimait bien, y compris nous, qui étions des loyalistes, de droite. Il s'imprégnait de ce que chacun pouvait dire, aussi bien d'un camp comme dans l'autre, et appliquait la méthode Rocard : négocier non-stop dès le début pour épuiser tout le monde, de manière à se retrouver autour d'une tasse de café. » Mais son action outre-mer ne se limite pas à la Nouvelle-Calédonie : il met en œuvre « l’égalité sociale », c’est-à-dire l’alignement des rémunérations et des prestations sociales outre-mer sur celles de l’hexagone, œuvre pour le développement de la Guyane et celui de Mayotte, gère de manière exemplaire la reconstruction de la Guadeloupe après le cyclone Hugo de 1989, mais se trouve aussi confronté aux difficultés sociales à La Réunion après les émeutes du Chaudron en 1991. Comme le rappelle Claude Lise, ancien député et président du conseil général de la Martinique : « C’est quelqu’un qui avait la fibre Outre-mer et il a été le premier qui a parlé de "différenciation" et la notion de "statuts à la carte", ce qui fait encore débat aujourd’hui. Sur le plan humain, c’était un homme extrêmement sympathique, un humaniste qui avait une fibre sociale, avec des convictions socialistes chevillées au corps. C’était un Rocardien pur jus qui comprenait l’outre-mer, qui avait le respect des différences ». Pas de doute en effet que, pour Michel Rocard, Louis Le Pensec au ministère de l’outre-mer a assurément été the right man in the right place at the right time. En février 1989, quand Claude Évin demande à être déchargé des fonctions de porte-parole du gouvernement, c’est Louis Le Pensec qui reprend le flambeau. En 1997, Lionel Jospin fait appel à lui pour le ministère de l’agriculture et de la pêche. Il ne restera que quinze mois rue de Varenne avant d’entrer au Sénat, mais – modèle rocardien oblige – c’est à l’unanimité qu’il fait voter une loi d’orientation agricole qui renforce la vocation sociale et environnementale de l’agriculture. Il faudrait aussi parler de son engagement européen – il était président de l’Association française des communes et régions d’Europe –, de son combat pour les langues régionales, de l’embellissement de sa commune de Mellac et de la région de Quimperlé. Son socialisme à lui n’était pas façonné par l’idéologie mais par l’approche concrète et la volonté opiniâtre de « changer la vie » des plus modestes, de réduire les inégalités, d’élever les consciences. Dans les débats internes des socialistes, il écoutait beaucoup et parlait peu. Toujours avec force et à bon escient. C’est pourquoi sa parole comptait. A l’occasion des 30 ans de la signature des Accords de Matignon-Oudinot, il disait : « Il n'est pas donné à tout homme politique de rétablir la paix, mais je n'étais qu'un des constructeurs du destin commun pour la Nouvelle-Calédonie. Ce fut une chance inouïe de vivre cela et de s'apercevoir que la parole politique peut parfois faire taire les fusils ». Il était comme ça, le « grand Louis » : humble et fier à la fois. Il nous rendait fiers, nous aussi, de cette façon de faire de la politique. Il suffit de regarder autour de nous pour constater à quel point le vide est immense. Jean-François MERLE Ancien conseiller de Michel Rocard pour l'outre-mer Vice-président délégué de MichelRocard.org Notre photo : Michel Rocard, Jean-Marie Tjibaou et Louis Le Pensec à Hienghène en 1988 |
Une histoire de personnes et de travail collectif, par Dorine Bregman |
Quand Pierre-Emmanuel Guigo m’a demandé si j’accepterais de retracer mon parcours rocardien pour la newsletter de l’association Michel Rocard.org, la première question que je me suis posée est la suivante : c’est quoi un parcours rocardien ? J’ai su alors que cela méritait quelques réflexions sur l’engagement politique, à gauche, et j’ai su que je pourrais répondre à cette question.
Un parcours rocardien, c’est une histoire de personnes et de travail collectif.
Un parcours rocardien, c’est le plus factuellement, celui que j’ai fait pendant quelques années avec un groupe de chercheurs et d’experts en science politique, parfois engagés au Parti socialiste, mais pas tous, qui s’est déroulé au milieu des années 80 et a trouvé son point culminant au cours des années où Michel Rocard a été le Premier ministre du second septennat de François Mitterrand, de 1988 à 1991. Étudiante en sciences politiques à Sciences Po Paris, j’ai eu comme enseignants en 3e année Elisabeth Dupoirier et Bernard Manin qui animaient un séminaire dit de « science politique approfondie » au cours duquel je me suis découvert un intérêt marqué pour la construction de l’espace public et de l’opinion dans les démocraties occidentales, notamment les Etats-Unis et la France. Par la suite, par capillarité, j’ai participé à des recherches empiriques sur les élections législatives de 1986 et présidentielles de 1988, ce qui m’a amené à préparer une thèse de science politique intitulée : « La construction des controverses politiques pendant les campagnes électorales en France – 1986 à 1988 ». Dans le cadre de ces recherches et de cette thèse, j’ai travaillé avec Gérard Grunberg, avec Jean-Louis Missika, co-signataire de plusieurs articles avec moi sur le rôle des médias dans la construction de l’agenda politique des campagnes, des controverses et par là-même, de l’opinion publique sur ces controverses[1]. A partir de la fin de l’année 1988, j’ai rejoint le Service d’information du gouvernement (SIG), appelé alors service d’information et de diffusion du premier ministre (SID). J’y ai travaillé à mettre au point des outils d’analyse des médias et de l’opinion publique, appelée par Jean-Louis Missika, dans la continuation de nos recherches précédentes. Il s’agissait de rendre opérationnelles des analyses politiques afin de faire un retour au gouvernement, et en particulier au Premier ministre, sur la perception de son action et sur sa popularité. Aujourd’hui, grâce aux outils puissants nés avec internet, des émissions, des outils d’analyse des réseaux sociaux, rendent compte et sondent en permanence cet espace public. Mais à l’orée des années 90, nos outils étaient plus modestes. Néanmoins, l’idée que les gouvernants ont besoin de comprendre la réalité sociale, la façon dont elle est perçue et filtrée par les constituants des identités sociologiques (classe sociale, genre, âge, orientation politique, vote, valeurs, opinions), était déjà très ancrée pour le collectif ainsi constitué entre le SIG et le cabinet du Premier ministre où œuvraient les mêmes personnes. Le contexte dans lequel Michel Rocard avait été nommé Premier ministre n’était pas étranger à la volonté de déminer le plus possible les débats politiques afin de ne laisser aucune prise à une interprétation de l’actualité politique à l’aune de la rivalité ancienne entre l’occupant de l’Élysée et celui de Matignon. Cela faisait partie du paysage sur lequel s’inscrivait toute analyse politique des médias pendant presque trois ans à Matignon. J’ai écrit ma thèse pendant que je travaillais au SIG, et je l’ai soutenue le 15 octobre 1991. Edith Cresson était Première ministre, et tout de suite après ma soutenance, je suis partie aux Etats-Unis pour un séjour de recherches post-doctorale. Fin d’un cycle. Mais un parcours politique est fait de motivations plus profondes, de racines plus anciennes, pas toujours identifiées sur le moment, qui relèvent d’une éducation et d’une socialisation politique. Je suis née dans une famille juive très marquée par la Shoah, avec des parents qui ont été des enfants cachés. Mon père, Grégoire Bregman, à partir de juin 1942, confié par ses parents internés au camp de Rivesaltes à l’Œuvre de secours aux enfants, ce qui lui a sauvé la vie pendant que Dora et Karl Bregman, mes grands-parents ont été déportés à Auschwitz via Drancy par le convoi n°24 du 26 août 1942. Ma mère a vécu toute la guerre avec ses parents, sous de fausses identités, cachés par des Justes dans un grand quart sud-Ouest de la France : Châlons-sur-Saône, puis Banassac-La Canourgue en Lozère, Cazaubon dans le Gers, Catus dans le Lot. Mon grand-père, Jacques Cahen, résistant dans les FFL, a été assassiné par des miliciens français le 30 mai 1944 sur la route de Cahors, à la sortie du village. Ma mère, Eliane Cahen, et ma grand-mère Sophie Cahen, sont ensuite revenues à Paris à la fin de la guerre, de même que mon père. Mes parents ont vécu leur jeunesse dans les années 50, et l’élément fondateur de leur socialisation politique, c’est la décolonisation. Ils étaient anticolonialistes, forcément mendésistes, et ont voté à gauche toute leur vie. Et c’est comme ça qu’à la génération suivante, on devient rocardienne. Quand j’ai commencé à m’intéresser à l’histoire politique, il n’y avait pas d’obstacle à cet engagement, au contraire. Mais ce qui m’est apparu différent et très spécifique à ma génération, ce sont précisément ces combats politiques des années 60 et 70, mai 68 bien sûr, et la suite. La lecture de Génération[2] fut très éclairante pour comprendre en quoi la lutte au sein du PSU, le combat syndical pouvait se raccrocher à d’autres combats collectifs par lesquels j’étais fascinée, comme le mouvement bundiste, autrement dit l’Union générale des travailleurs juifs, le mouvement révolutionnaire juif laïc à la fois opposé au bolchévisme et au sionisme. Après plusieurs décennies consacrées à d’autres aspects de la vie, j’ai rejoint le Parti socialiste en 2013, auquel j’ai adhéré, en particulier pour militer pendant la campagne des élections municipales de 2014. Je suis devenue trésorière de la section du 3e arrondissement, puis co-secrétaire de la section Paris centre, créée en 2018. C’est en 2018 que la section a reçu Henri Weber pour débattre de mai 68 et des années 70, à la suite de la publication[3] du premier tome de ses mémoires. Rocard et Fabius, les courants concurrents au sein du PS des années 80 et 90… En tout cas, je retiens de ces années rocardiennes, qui coïncident avec la période la plus dense de ma formation intellectuelle et professionnelle, un très grand sens du travail collectif, le doute et l’esprit critique comme garde-fous à toute tentation d’hégémonie intellectuelle, et des valeurs humanistes qui me servent toujours de boussole dans mes engagements présents. Dorine BREGMAN maire adjointe de Paris centre, secrétaire nationale adjointe du Parti socialiste [1] Mars 86, la drôle de défaite de la gauche, sous la direction d’Elisabeth Dupoirier et Gérard Grunberg, PUF, 1986.
[2] Hervé Hamon et Patrick Rotman, Génération, Éditions du Seuil 1987. Tome 1 : Les années de rêve, Tome 2 : Les années de poudre
[3] Henri Weber, Rebelle jeunesse, éditions Robert Laffont, 2018
|
Jacques Mistral : démêler l’embrouillamini permanent entre ambitions politiques et contraintes économiques |
||
Ancien conseiller de Michel Rocard à Matignon, Jacques Mistral renoue avec son premier métier d'universitaire, à l'Université Paris-XIII et à Sciences Po, pour publier une somme, intitulée "Économie et politique en France", dans laquelle il questionne les relations toujours complexes et les interactions parfois conflictuelles entre économie et pouvoir politique. Le premier volume de cet ouvrage couvre la période qui va de la Gaule romaine à la Révolution française. Pour "Convictions", Jacques Mistral explicite dans cet entretien le sens et la portée de ses analyses.
Vous débutez le premier ouvrage de votre somme par la Gaule romaine, qui peut sembler lointaine de notre monde - même si le président s’est plaint des « gaulois réfractaires ». Que peut-on apprendre de cet exemple historique ? Je ne me suis assurément pas engagé dans ce travail pour réhabiliter le célèbre récit national qui fait remonter la France d’aujourd’hui à « ses ancêtres les Gaulois » ! J’espère plutôt apporter des éléments de réponse à trois questions. La première concerne les périodes de croissance forte et leurs lendemains, moins favorables, voire chaotiques ; c’est ce que nous avons connu avec les « Trente Glorieuses », le « fordisme », et la caractérisation la plus fréquente de ce qui suit, c’est que nous serions « en crise », depuis cinquante ans, c’est un peu court. Quels enseignements peut nous livrer l’histoire longue en interprétant des épisodes à certains égards comparables ? Eh bien, précisément, la Gaule romaine mais aussi le premier Moyen-Age nous donnent à voir deux exceptionnelles périodes de prospérité, de -44 à 250 puis de 1050 à 1350 (grosses dates, bien sûr) séparées par une très longue période de repli sous les royaumes franc, mérovingien et carolingien. Un deuxième objectif consiste à mieux comprendre comment s’entrecroisent les facteurs économiques et politiques pour expliquer la dynamique à l’œuvre en période de prospérité et les facteurs de blocage qui en annoncent le terme : peut-on dégager les traits d’un pouvoir créant les conditions du dynamisme économique ? Quels dégâts peut provoquer un pouvoir prédateur, stérilisant à son profit une grande part de la richesse ? Troisième question, celle de l’exceptionnalisme français, puisque le « modèle » français se caractérise en termes économiques aussi bien que politiques par une centralisation qui n’a pas d’équivalent chez nos partenaires de l’Union européenne. Je n’en suis qu’à la Révolution mais le bilan sur ces trois points est prometteur. Vous avez été le conseiller économique de Michel Rocard à Matignon : envisagez-vous votre ouvrage comme une sorte de manuel à destination des politiques pour mieux appréhender les rapports entre objectifs politiques et objectifs économiques ? Un manuel, certainement, utile à tous ceux qui cherchent à démêler l’embrouillamini permanent dans lequel nous vivons jour après jour entre les ambitions politiques affichées avec assurance et les contraintes qu’opposent sans répit les réalités économiques et financières. L’élément central de notre histoire économique et politique est à cet égard l’absolutisme. L’absolutisme apparaît en Europe au XVIe siècle pour mettre un terme à l’anarchie, aux guerres de religion. C’est aussi l’époque où la pensée économique fait avec le mercantilisme un pas de géant en associant la richesse du royaume et sa puissance. Mais cette articulation obéit à deux logiques très différentes en France et en Grande-Bretagne. Outre-Manche, le mercantilisme est l’arme intellectuelle de la bourgeoisie naissante et le royaume tire sa richesse du grand commerce ; les Actes de navigation en 1644 sont le socle de cette alliance, la révolution de 1688 son débouché politique ; c’est le point de départ du lien qui se généralisera en Europe entre capitalisme et politique parlementaire. En France, la royauté tire sa richesse de l’agriculture, systématiquement exploitée pour servir à la gloire du roi ; en 1709, le pays est ruiné et une redistribution du pouvoir, à l’anglaise, se profile. Mais la faillite de John Law, épurant les dettes royales, donnera un sursis de 60 ans à la monarchie absolue ; celle-ci s’enracine ainsi profondément pour marquer de manière définitive les institutions (la centralisation, Tocqueville) et les mœurs (la détestation du commerce, le sens de l’honneur). Le message synthétique des trois épisodes que je viens d’évoquer est clair : que la politique préserve la vitalité de la société civile, que celle-ci, par son organisation et ses résultats, consolident l’esprit civique et la justice. Vous distinguez des systèmes décentralisés, comme celui de la Gaule romaine, et le système absolutiste de l’époque de Louis XIV où le politique veut déterminer l’économique. Peut-on dire que Michel Rocard est un « gaulois » et François Mitterrand un « absolutiste » ? C’est là une façon inattendue de tirer les leçons de mon livre ! Le régime gallo-romain est en effet, contrairement à l’intuition, un système décentralisé. L’empire exerce, pendant les trois siècles de prospérité, une autorité lointaine, il assure la « paix romaine », il diffuse les infrastructures propices à l’activité économique, les routes, les ports, la langue, le droit privé et il tire ses revenus des conquêtes. Les élites gallo-romaines saisissent ces opportunités et participent à une intense économie d’échanges à l’échelle « du monde connu » ; ces élites sont à la fois urbaines et rurales, les pratiques d’origine romaine règlent la vie publique à l’échelle des anciens peuples gaulois, l’évergèse assure une sorte de légitimité à ce régime où « la classe possédante est aussi la classe dirigeante » (Paul Veyne). C’est un schéma inverse qui s’impose aux XVIIe et XVIIIe siècles ; le pouvoir royal, dans les mains des intendants, draine les ressources vers les besoins de la guerre et de la cour, les villes sont dessaisies de leur autonomie, la bourgeoisie perd de vue sa mission historique, les élites, la noblesse et le haut-clergé fascinées par la cour et les pensions royales se désintéressent de tout ce qui fait la richesse du royaume. Par contraste, celle, provocante, des puissances commerçantes suscite une jalousie fébrile et le roi confiera à Colbert le soin de donner à la monarchie absolue une fragile façade manufacturière. On sait que l’articulation de l’économique et du politique fut un terrain de désaccord constant entre François Mitterrand et Michel Rocard et je comprends l’association que vous suggérez, même si personne ne la prendra à la lettre, puisque le premier était profondément attaché au primat du politique en toutes circonstances et le second toujours soucieux de créer les conditions économiques du succès politique. Michel Rocard avait une vision que l'on pourrait qualifier de "naturaliste" de la politique économique, quand il utilisait des comparaisons botaniques pour expliquer qu'une plante ne poussera pas plus vite si on lui tire dessus... Quelle place restait-il pour la politique dans cette conception ? La citation de Michel Rocard que vous rappelez est l’une de mes préférées : il n’y a pas de formulation plus parlante pour condamner le volontarisme qui inspire toujours une partie importante de la gauche. Michel Rocard faisait souvent remonter ce biais à l’influence exercée par Jules Guesde sur la formation du socialisme français ; je pense qu’on peut remonter plus loin, à la Révolution française. La noblesse, campant sur ses privilèges en particulier fiscaux, refusa toute alliance avec la bourgeoisie si bien que, contrairement à la « glorieuse révolution » anglaise, ce fut le peuple en armes qui assura la victoire de la Révolution. Et du désordre qui en résulta naquirent en 1793 les mythes caractéristiques du jacobinisme - dont l’économie dirigée. Malgré le désastre économique qui en résulta, l’historiographie marxiste a ensuite enseigné à Jules Guesde et à ses héritiers que c’était là le moment fondateur d’une politique économique alternative au libéralisme. Le plus frappant depuis cette origine lointaine est l’incapacité de cette gauche à tirer les leçons d’expériences multiples. A la fin des années 70, par exemple, Jean-Noël Jeanneney avait rappelé aux négociateurs du programme commun « Les leçons de l’échec du cartel des gauches » en 1924 ; l’Union de la gauche les répètera avec un inébranlable aplomb en 81-83. Une grande partie de l’électorat refusa, et refuse encore aujourd’hui, d’admettre que le tournant de 83 constituait le seul moyen d’éviter une trajectoire « albanaise » (on dirait aujourd’hui vénézuélienne). Bref, pour en revenir à Michel Rocard, sa conception de la politique économique reposait sur deux principes. Ceux, d’abord, d’un bon jardinier, créant les conditions du dynamisme de l’activité économique, emploi, innovation, investissement, compétitivité ; et il voyait dans le bon fonctionnement du marché une condition nécessaire de l’efficacité. Mais il n’en était certainement pas un thuriféraire puisqu’il en connaissait bien les limites (son hostilité à Milton Friedman était proverbiale) ; en acteur engagé de la vie publique, il faisait de la justice une condition tout aussi nécessaire au succès de sa politique, par le dialogue social, par la sécurisation collective des trajectoires individuelles, par l’appel à la responsabilité de tous. Propos recueillis par Pierre-Emmanuel GUIGO Jacques MISTRAL, Économie et politique en France, tome 1, Paris, 2024, Éditions Gallimard, 368 p.
|
||
Michel Rocard face aux crises agricoles |
||
Ministre de l'Agriculture, Michel Rocard a dû faire face à différentes crises agricoles. La profession a eu beaucoup de mal à accepter l'instauration des quotas laitiers, c'est-à-dire un encadrement du droit à produire, alors même que ce mécanisme assurait aux éleveurs un prix garanti et rémunérateur. Après avoir manifesté durement contre leur mise en place, ils ont déploré leur suppression en 2015, décision qui n'est pas sans lien avec la crise actuelle des revenus agricoles. Dans un entretien qu'il avait accordé en 2006 à Christophe Bellon pour la revue "Parlement(s)", Michel Rocard évoquait, à propos de la réforme du marché du vin, les risques qu'il avait déjoués par une mesure inédite de distillation obligatoire.
" (...) Nous attendions donc avec impatience le projet de directive de la commission discrètement rédigé, sans bruit, au milieu de la préparation du Conseil agricole qui n’avait pas le vin à son ordre du jour. À la lecture de la directive, je découvre que l’on formalise des critères extrêmement restrictifs, mais sans changer les principes. On décide donc que la distillation ne se fera que pour des quantités invariantes et pas susceptibles d’augmenter d’année en année, relativement réduites par rapport aux besoins et à prix relativement bas. Quand la profession apprit cela, les comités d’action agricole s’exclamèrent : « Ils veulent la guerre ! ». Il faut savoir aussi que l’agriculture n’était pas un secteur très calme. Les agriculteurs français étaient durement manifestants, très bien organisés. Parmi eux, les mieux organisés et les plus forts étaient les Bretons, à cause de la puissance, parfois de la violence des deux fédérations du porc et du mouton. Ils cognaient avec des fourches, utilisaient des tracteurs pour effrayer les automobilistes. Ils n’utilisaient jamais les fusils, à l’inverse des viticulteurs qui, eux, manifestaient toujours avec. Aléria, le drame corse, est un drame viticole. C’est donc la panique une fois de plus. Je commence à prévenir mes collègues au moment des sommets informels en leur disant que le projet de directive était très difficile à mettre en application. Oui, mais alors que faire d’autre ? Certains pays, à l’instar de l’Italie, étaient dans une situation plus difficile que la nôtre. Les Italiens en étaient à faire « pisser la vigne » à deux cents hecto/hectare et distillaient sensiblement des volumes plus forts encore que les nôtres. Et dans leur secteur, ils faisaient, en matière de vin de table, une piquette bien pire que la nôtre.
Enfin, c’était assez effrayant. J’ai passé quatre ou cinq mois sur le dossier – je ne faisais plus que cela – à chercher une solution qui ne venait pas. Je disposais cependant d’un atout : le temps. Être un ministre ostracisé, ayant la méfiance du Président, m’interdisait un peu l’accès aux médias et le commentaire général des politiques publiques. Donc, j’avais plutôt la paix. J’étais plutôt à l’ombre. L’ombre est préservatrice de temps. Et un beau jour, c’est en me rasant le matin – ça peut faire rire aujourd’hui, car l’image a servi récemment – que j’ai eu une idée confinant à l’œuf de Christophe Colomb. Il s’agissait de rendre obligatoire la distillation qui n’était que facultative et la rendre obligatoire avec des volumes parfaitement massifs, de manière à essayer d’obtenir que le total de production restante à distiller tombât en dessous du niveau de la demande, pour relancer le marché. La condition pour que cela marche était évidemment qu’il fallait distiller beaucoup en payant très mal. Avec cette idée, mes interlocuteurs allaient-ils comprendre et accepter ? D’autant que toute l’idée était de faire des économies. Il y avait donc une audace intellectuelle. Et puis comment aller vendre une idée pareille chez les non-producteurs payeurs en Europe ? Nous étions dix à l’époque, car l’Espagne dont nous parlions précédemment ne nous avait pas encore rejoint. En plus, j’étais relativement pressé, parce que l’idée devait être appliquée avant que l’Espagne n’arrive, pour ne pas avoir à en discuter avec elle.(...)"
|
||
|
||||
Convictions est édité par l'Association MichelRocard.org. Directeur de la publication : Pierre Pringuet. Conception, réalisation et routage : APHANIA. Copyright : MichelRocard.org. Tous droits réservés. Conformément à la loi 2004-801 du 6 août 2004, modifiant la loi 78-17 du 6 janvier 1978, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. Pour l'exercer, adressez-vous à Association MichelRocard.org (12 Cité Malesherbes - 75009 Paris) ou écrivez à contact-asso-michelrocard@alyas.aphania.com |